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Quand les influenceurs s’improvisent conseillers financiers

par 16 Août 2021Numérique, Regulatory

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En ce doux mois de juillet 2021, pendant que l’on bronzait déjà sur la plage, Nabilla était condamnée à payer 20 000 euros d’amende par la DGCCRF, pour pratiques commerciales trompeuses.

En effet, la starlette de TV-réalité s’est un peu trop emballée sur le réseau Snapshat en proposant à ses followers d’investir dans le Bitcoin sur un site de trading désigné.

La DGCCRF a d’ores et déjà annoncé que cette sanction ne serait que la première d’une longue série visant à recadrer les influenceurs étourdis.

Le statut d’influenceur est devenu ces dernières années un véritable phénomène.

Cependant, la « professionnalisation » des influenceurs et leur force de persuasion vis-à-vis d’un jeune public les placent aujourd’hui dans la ligne de mire des autorités qui comptent bien remettre un peu d’ordre dans tout cela.

On a pu lire sur l’internet que le statut d’influenceur n’est pas juridiquement défini.

C’est faux !

Si aucun statut spécifique n’existe, l’influenceur professionnel est impacté par les textes généraux venant réglementer la publicité concernant certains types de produits ou certaines catégories de populations.

Influenceurs : attention aux règles du code de la consommation

L’influenceur exerce une activité professionnelle dès lors qu’il se fait rémunérer pour ses placements publicitaires. Que cette rémunération soit directe ou indirecte (avantages en nature).

Soit il est sous la subordination de la marque qui « l’emploie », et il est dans ce cas « salarié » (ou en tout cas, peut se prétendre comme tel lors d’une action en requalification en contrat de travail) ; soit il exerce sa prestation en toute indépendance, et il s’agit d’une convention commerciale de partenariat.

Dans ce dernier cas, l’influenceur professionnel doit respecter les règles du droit de la consommation lorsqu’il s’adresse à des consommateurs, et notamment s’abstenir de toute pratique commerciale trompeuse ou déloyale.

La notion de “pratique commerciale” en tant que telle n’est pas définie dans le Code de la consommation mais dans la directive européenne n° 2005-29 du 11 mai 2005. Il s’agit de:

« toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d’un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un produit au consommateur ».

Le Code de la consommation prévoit pour sa part une liste de pratiques commerciales présumées trompeuses (Articles L 121-2 à 4).

Dès lors que l’influenceur induit le consommateur en erreur en donnant l’impression qu’il n’agit pas en tant que professionnel rémunéré, la pratique commerciale trompeuse est constituée. De même lorsque l’influenceur induit le consommateur en erreur sur les caractéristiques essentielles du contrat ou la gratuité du produit/service.

Mais la liste des agissements énumérés est longue, très longue …

On ne peut que conseiller aux influenceurs de faire valider le contenu de leurs présentations avant toute diffusion audio ou vidéo.

La DGCCRF a notamment motivé sa sanction contre Nabilla de la façon suivante :

Dans sa « story », l’influenceuse, suivie par plusieurs millions de personnes sur les réseaux sociaux, a omis de mentionner qu’elle était rémunérée par les sociétés exploitant ce site pour en faire la promotion. Or, le défaut d’indication du caractère publicitaire de sa publication (par un logo ou une mention orale ou écrite par exemple) constitue une pratique commerciale trompeuse à l’encontre de ses abonnés qui peuvent croire à tort que la promotion de l’influenceuse résulte d’une expérience personnelle positive désintéressée.

Par ailleurs, dans cette « story », Nabilla Benattia-Vergara a allégué de la gratuité du service proposé par le site de trading, de la récupération systématique des sommes investies et de rendements pouvant aller jusqu’à 80 % grâce à leurs conseils. Ces propos sont de nature à induire le consommateur en erreur sur les caractéristiques du service et les résultats attendus de son utilisation. En cela, ils relèvent, eux aussi, de la qualification de pratiques commerciales trompeuses.

On peut se demander quelles seront les conséquences des sanctions à venir sur le périmètre de la responsabilité des influenceurs. Par exemple, en cas de défectuosité du produit, le consommateur pourrait-il se retourner contre l’influenceur en supplément de son action en responsabilité contre le vendeur ?

 

Influenceurs : attention à la règlementation financière

En outre, certains produits « à risque » font l’objet d’une règlementation spécifique.

C’est le cas des produits financiers ainsi que des placements « sur actifs numériques », qui sont particulièrement volatiles.

Le démarchage concernant les placements financiers et sur actifs numériques est fortement encadré, nécessitant d’avoir un statut spécifique.

La prise de contact doit cependant être individualisée : qu’en est-il des influenceurs qui répondent à leurs followers par le biais de messageries internes, comme sur Instagram par exemple ?

En outre, la publicité concernant certains produits particulièrement à risque (CFD, FOREX, contrats financiers) est interdite par voie électronique, depuis la loi Sapin II.

Or, il n’est pas rare de voir se développer, y compris sur les plateformes crypto les plus mainstream, des opérations de trading entrant dans la catégorie des placements précités.

Et d’ailleurs, la promotion des services sur actifs numériques est spécifiquement encadrée, depuis la loi PACTE.

L’article L 222-16-1 du Code de la consommation interdit « toute publicité, directe ou indirecte, diffusée par voie électronique ayant pour objet d’inviter une personne, par le biais d’un formulaire de réponse ou de contact, à demander ou à fournir des informations complémentaires, ou à établir une relation avec l’annonceur, en vue d’obtenir son accord pour la réalisation d’une opération relative à (…) La fourniture de services sur actifs numériques au sens de l’article L. 54-10-2 du même code, à l’exception de ceux pour la fourniture desquels l’annonceur est agréé dans les conditions prévues à l’article L. 54-10-5 dudit code ».

Il faut savoir qu’à ce jour le flou demeure sur ce que la DGCCRF considère comme relevant ou non de « l’invitation par un formulaire de réponse ou de contact », la formulation de l’article étant suffisamment vague pour cibler de nombreux usages.

Sont concernées par ces interdictions et les sanctions associées tous les intermédiaires dans la chaine de promotion et notamment « tout intermédiaire réalisant, pour le compte d’un annonceur, une prestation ayant pour objet l’édition d’une publicité interdite ».

En outre, l’article L 222-16-2 interdit « toute opération de parrainage ou de mécénat (…) lorsqu’elle a pour objet ou pour effet la publicité, directe ou indirecte, en faveur » de services sur actifs numériques non agréés, la sanction pouvant aller jusqu’à 100 000 euros d’amende.

Il y a donc de vrais risques pour l’influenceur, de sanctions financières et pénales.

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Halt Avocats

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